Le hérisson et le rhinocéros

Publié le 12 Mai 2016

Il y a des jours comme aujourd’hui où je m’ennuie et en fait, je me souviens brutalement que j’ai un blog, et donc je m’empresse d’ouvrir ma page blanche sous Word. C’est d’ailleurs la génèse de ce blog : l’ennui de bureau, ce désœuvrement sournois et revanchard, ce refus d’effectuer les tâches attendues et cette fierté toute puérile de glander plutôt que de bosser. Cette fenêtre de liberté qu’offre l’Internet au travail, pour s’échapper quelques instants de l’open space. Pour se rappeler qu’il y a un ailleurs, qu’il y a une vie en dehors du boulot. Et quelle vie, mes amis.

Du coup, j’ai à nouveau perfectionné ma routine de la glande au bureau, comme au bon vieux temps. Des blogs délassants, du genre les chroniques littéraires de Romanthé qui me donnent envie de me ruiner chez le libraire. Des blogs super bizarres qui me font planer à des milliers d’années-lumière au-dessus de la consolidation comptable, qui parlent du Macchu Pichu, des lignes de Nazca et des pyramides bosniaques, bref, qui me font rêver. Des sites d’actualité et mon bon vieux Twitter pour apprendre des choses, me cultiver sur l’histoire, la politique, la société. Tenter de comprendre. Snapchat avec des écouteurs pour écouter des blogueuses beauté me raconter leurs journées et filmer leurs chiens en train de japper, ou pour regarder les vidéos marrantes de mes quelques amis snapchatteurs (ajoutez-moi au fait : nombrepremier. On va se marrer).

J’ai assez de démarches administratives à effectuer pour occuper tous mes après-midis mais je préfère les étaler dans le temps pour faire durer le plaisir. Je pense aux vacances. Je surfe sur des sites d’immobilier à la recherche d’une grande ferme avec plusieurs bâtiments, dans un coin paumé et vallonné, pas trop loin d’une grande ville (une heure de voiture maximum) qui pourrait accueillir une communauté de personnes en mode kibboutz (oui, j’ai des projets d’avenir mes chers amis). Je pense aux amis d’ailleurs, je me demande comment vont leur vie, s’ils sont heureux. Je note mentalement de les appeler au plus vite, de renouer les liens qui parfois se distendent. J’aime beaucoup mes amis.

J’étais à un mariage ce week-end, sous le soleil éclatant du Nord (eh oui, les miracles arrivent). C’était un excellent moment. Je ne sais plus qui m’a expliqué à ce mariage que dans un couple, il y avait toujours un hérisson et un rhinocéros. Maintenant que j’y pense, je crois que c’était en fait ma collègue des normes comptables (un autre métier palpitant) qui tenait ces propos à la cantine, alors que la plupart des gens du service étaient remontés comptabiliser des choses et d’autres. Il restait autour de la table Stagiaire, qui est très intéressée par ces discussions de grande fille, Collègue Russe (qui n’avait pas l’air passionnée), Collègue Fantaisiste et donc mes deux collègues du service Normes (pensée émue au beau gosse des normes du début de ce blog). Ce petit panel de femmes entre 22 et 45 ans commencèrent à discourir sur le couple, sur les secrets de sa longévité et de comment être heureux en ménage. Étant moi-même passée depuis peu du côté obscur, j’ai avidement écouté, au cas il y a une astuce pour gagner dix mille dollars d’un coup comme dans Sim City. Ma collègue inspirée s’est donc fendue d’un « De toutes façons, dans un couple, il y a toujours un hérisson et un rhinocéros ».

Nous l’avons pressée de s’expliquer : apparemment, lors d’une relation à deux (je précise pour les polyamoureux qui me lisent), il y a toujours un membre du couple qui provoque la discussion, qui aborde bille en tête les sujets qui fâchent et qui fonce dans le tas. L’autre préfère éviter l’affrontement, il préfère laisser couler et fermer les yeux quand ça l’arrange. D’où la métaphore animalière. Et tout un chacune de se positionner, dans sa relation présente ou celles passées, de chaque côté de la barrière.

Inutile de préciser que je suis un bon gros rhinocéros laineux et que mon charmant compagnon amateur de thé est un discret hérisson mignon qui grattouille les feuilles mortes au fond de la cour. Que se passe-t-il si on met deux rhinocéros ensemble ? Des étincelles ; ils s’affrontent à n’en plus finir lors d’épiques combats de boue (ou équivalent). Une relation passionnelle, dramatique, à la Taylor Swift dans Blank Space. Et deux hérissons ensemble, alors ? Il ne se passe rien. Personne ne dit les choses, alors le statu quo perdure. Les deux protagonistes se sentent plus ou moins heureux dans cette relation mais aucun ne songerait à évoquer le sujet. La vie continue. On peut être heureux dans chacune des configurations, tant qu’elle nous convient.

Je vais peut-être aller fouiller le Net à la recherche des considérations les plus débiles sur les relations amoureuses pour pouvoir les partager (et les commenter) ici. Une autre tâche à ajouter à ma to-do déjà bien remplie. Suggestions bienvenues !

Rédigé par Nombre Premier

Publié dans #Love etc

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