Happily ever after
Publié le 9 Juillet 2012
Je sais, ça fait un bail (3 jours) que je n’ai rien écrit. Je vis une période intéressante où je rêve de tableaux Excel et d’antibiotiques qui agissent sur mon système immunitaire façon Il était une fois la vie.
Mais là, il fallait que j’écrive un truc, parce que j’ai un scoop ! Un truc de dingue ! Mieux qu’Adèle enceinte ou TomKat et Vanessjohnny qui divorcent.
Collègue Blonde va convoler en justes noces !
Ca m’a fait un choc. Mardi matin, quand elle est arrivée au boulot, il n’y avait que nous dans l’open space. Elle m’a dit « J’ai un scoop ». J’ai dit « Balance ». Et elle m’a montré sa bague de fiançailles. Malgré moi, je me suis sentie super excitée, comme dans 27 Robes et tous les films hollywoodiens du même acabit. On a passé une demi-heure à parler de plans de tables, de DJ et de faire-parts. Puis Collègue Blonde a annoncé la nouvelle à ma chef qui arrivait, à Spychopat (qui s’est écrié spontanément « Ca donne trop envie ! »), aux stagiaires, bref, à tout l’étage. Pendant deux jours, ce fut un nuage de félicitations, de questions, de partage d’expériences et de bons conseils.
Entendons-nous bien, je n’ai aucune envie de me marier dans la minute. Je ne préfèrerais pas être déjà mariée à mon âge canonique de 25 ans. Je suis très bien comme je suis aujourd’hui. Mais peu à peu, un sentiment d’envie a quand même poussé un peu au fond de moi. Ce n’est pas tant le mariage en lui-même que j’enviais. J’ai déjà plein de couples heureux autour de moi, et pourtant je n’envie pas leur bonheur (j’essaie de le partager !) Ce qui m’a fait envie, c’est que Collègue Blonde se conforme avec succès à une norme sociale cruciale, sans même s’en rendre compte, sans se poser trente-six questions, et tout simplement parce que ça la rend heureuse.
Tu te pacses, tout le monde s’en fout. Tu pars en vacances avec quelqu’un pour la première fois, tu t’affiches sur Facebook, il a rencontré tes parents, c’est super important, mais personne ne peut le savoir, puisque l’importance donnée à ces marques d’engagement n’est pas normée. Personne ne t’offre un bouquet quand tu emménages avec un être aimé, alors que pour toi c’est finalement ça l’étape la plus symbolique. Les deux évènements qu’on célèbre sur la place publique (au travail) sont le mariage et la naissance. Pour ces deux-là, tu as droit aux tapes dans le dos, aux félicitations, aux blagues et à un puissant sentiment d’intégration. Je suis comme les autres. J’appartiens au même groupe. Les autres me reconnaissent comme l’un de leurs semblables.
Suite à l’annonce de Collègue Blonde, j’ai ressenti de l’envie parce que je ressentais de la peur par anticipation. Une peur débile que j’ai combattue de toutes mes forces, mais qui existe quand même. J’ai peur qu’à 28 ans, à l’âge de Collègue Blonde, je ne me marie pas. Qu’à trente ans non plus. Que je ne marie jamais. Que je n’aie jamais droit aux mots de félicitations de la part du DAF et aux sourires complices des collègues. Qu’à la place, j’ai droit aux non-dits qui pèsent lourds et aux ragots du genre « Mais pourquoi elle est encore seule à son âge, la pauvre, ça ne doit pas être facile ». Dans la même veine, j’ai peur qu’à 30 ans, à l’âge de Collègue Maman, je n’ai ni un, ni deux enfants. Qu’à 35 non plus. Que je n’ai pas d’enfants tout court. J’ai peur de ne pas avoir droit au bouquet de fleurs et aux vêtements Petit Bateau, mais à de la pitié et de l’incompréhension. J’ai peur d’affronter ces réactions au boulot, mais aussi parmi mes amis, ma famille.
C’est stupide, vraiment. Pourquoi ce besoin terrible d’appartenir ? Pourquoi chercher de la reconnaissance et de l’approbation pour des choses de l’ordre de l’intime, moi qui crois farouchement que ce domaine-là est celui de toutes les libertés et ne regarde personne ? Je ne sais pas. Un manque de maturité, peut-être. Les normes sociales, que je m’y conforme ou non, ne m’angoissent jamais d’habitude. C’est seulement par bouffées, au moment des grandes nouvelles de ceux qui m’entourent.
Ce qui ne veut pas dire que je ne suis pas profondément heureuse pour eux, au contraire. Je suis ravie pour Collègue Blonde. Elle va me présenter son fiancé. On est allé voir Starbuck ensemble et c’était super. Hier j’ai vu l’Âge de glace et c’était très drôle. J’ai passé un demi-week-end délicieux à profiter de mon lit, à mater Geordie Shore, le Jersey Shore anglais, de vieux épisodes de Strip Tease, et à me créer un profil sur Couchsurfing. Et j’ai vernis mes ongles en rose fluo hier. Quand je tapote sur le clavier pendant que les auditeurs attendent leur réponse, ça fait des taches psychédéliques devant mes yeux.
T'as vu comme je m'en fous des normes sociales.