In bed with your friends
Publié le 19 Juin 2013
Les groupes de potes. Tu peux en avoir plusieurs, issus de tes différentes vies, les études, le boulot, les loisirs. Tu peux les mélanger, aussi. Mais il y en a un qui n’a pas besoin des autres pour se mélanger : le groupe de potes qui couche ensemble.
Dans ce groupe, il y a des filles, des garçons, des hétéros, des homos, des célibataires et des gens en couple. Tout un tas de combinaisons possibles. Les relations entre les individus fluctuent en permanence donc c’est très difficile de s’y retrouver. Limite, il faudrait un update quotidien pour savoir ce qu’il s’y passe.
Quand tu intègres le groupe, un peu par hasard ou via le biais d’un-e ami-e, tu comprends vite qu’il y a quelque chose de pourri dans ce royaume du Danemark. Certains jeux de regard, des gestes appuyés, des private jokes et des sous-entendus bien louches te font dire que les membres de ce groupe ont partagé ou partagent bien plus que quelques bières et de trop longues soirées en terrasse. Alors tu enquêtes discrètement. Mais dis-moi, il n’y aurait pas un peu anguille sous roche entre Machin et Truc ? Et c’est là qu’on te répond tout naturellement : Ah si, ils sont sortis ensemble pendant un moment, puis ils ont été plans culs un petit peu, là j’ai l’impression que ça repart un peu. Ah bon, très bien, je n’en demandais pas tant. Comme ça au moins on est tous à jour sur les dernières configurations sexuelles ou romantiques du groupe.
Au fil du temps, tu découvres donc d’intéressants liens entre les gens et tu réalises que tous les membres du groupe se sont déjà choppés entre eux (même les hétéros et les homos, pour rigoler). Encore plus incroyable, par le principe de transitivité de la choppe, une bonne partie du groupe a en fait déjà couché ensemble (Machin couchant avec Truc qui couche ensuite avec Bidule etc). Tu t’étonnes un peu. Toi, ça te ferait bizarre de discuter de ton dernier plan cul avec ton meilleur pote alors que c’est aussi sa première ex. Mais bon. The more the merrier, comme on dit.
Du coup, tu te cales en arrière dans ta chaise au Cinquante, une bière blanche bien fraîche à proximité, et tu observes la suite des évènements. Les relations se nouent et se dénouent, on croirait voir des danseurs échanger leurs partenaires avec grâce et légèreté. Ça tourne, ça retourne, ça tourne en rond parfois. Et comme tout se passe au sein du groupe, c’est très public, tout le monde sait qui a fait quoi avec qui, combien de fois et quand. On en blague. Totale transparence. On se demande quelle sera la prochaine configuration que l’on n’a pas encore testé, si Machin se mettait à sortir avec Truc et que Bidule choppait Untel, je crois qu’on aurait fait le tour des possibilités, plus de combinaisons possibles.
Le seul truc un peu pénible, c’est que l’ambiance dans le groupe varie au gré des relations. Parfois, il y a un froid entre deux bons potes à cause d’une troisième personne. Parfois, il y a des engueulades dramatiques dans un bar bondé entre deux membres dont on ne pensait même plus qu’ils sortaient ensemble, qu’ils couchaient ensemble. Parfois, il y a des bouderies, des cachotteries, des sacs de nœuds et des indélicatesses. Ca occupe. Il faut juste savoir un peu où l’on met les pieds, éviter la gaffe, écouter les confidences des deux camps sans prendre parti car on ne sait pas de quoi l’avenir sera fait, se confier à l’un mais savoir se taire avec un autre, donner des conseils mais ne pas se mouiller, prendre du recul et ne pas se laisser phagocyter. Car au final, quoi qu’il se passe, le groupe n’implosera jamais. Ça crée des liens, de fricoter ensemble. Comme une amibe ou un protozoaire, le groupe est une entité en lui-même, qui pourra à la limite évoluer à un stade supérieur, mais qui ne pourra pas être dissocié.
Comme c’est très difficile d’être à jour, la situation changeant parfois de semaine en semaine, il vaut mieux abandonner toute tentative de compréhension. Ne pas se laisser absorber par le microcosme très fermé que représente un groupe de potes qui couche ensemble. On peut prendre l’air, voir ses autres groupes de potes, ou injecter du sang neuf. Comme ça, on y revient détendu, on prend à nouveau plaisir à apprécier ce délicieux spectacle à l’apéro, à disséquer sans fin le pourquoi du comment au-dessus d’une planche mixte, à commenter les derniers évènements sur Facebook une fois la soirée finie. Mais il faut savoir refermer le magazine people. Patience jusqu’au prochain épisode !